Témoignage – Mamie de Maël

19 Mai, 2020 | Témoignages

En tant que maman, nous souhaitons le meilleur pour nos enfants. Nous leur donnons une éducation pour leur avenir, et notre souhait le plus cher est qu’en devenant adultes, ils puissent s’épanouir dans leur vie professionnelle et amoureuse.
 
Mes enfants et petits-enfants font de moi la personne que je suis devenue grâce à leur présence et l’amour qu’ils me portent.
 
A l’été 2017, ma fille Pauline m’annonce que je vais devenir à nouveau grand- mère, la joie est immense, ce n’est que du bonheur.
 
Malgré sa grossesse très difficile et un accouchement en urgence à 31 semaines, Maël viendra au monde le 23 janvier 2018. Habitant à plus de 300 km, je reçois une photo de mon petit ange, il est magnifique, mon cœur de mamie fond en le voyant. Maël restera quelques temps à l’hôpital, pendant 1 mois et demi. J’ai des nouvelles tous les jours et je reçois des photos.
 
Le 26 février, petit bout de chou rentre enfin à la maison auprès de ses parents. Ils vont enfin pouvoir commencer leur nouvelle vie avec leur enfant et vivre leur vie de famille pleinement.
 
Malheureusement, à cette époque j’étais bien loin d’imaginer que ce bonheur ne serait que de très courte durée et que la vie de ma fille, la mienne et celle de notre famille, allaient être brisées à tout jamais.
 
La semaine du 17 au 23 Mars 2018 a été la pire de ma vie. Suite à un appel téléphonique de ma fille Pauline en pleine nuit, elle m’apprend que son fils a fait un arrêt cardiaque. Nous partons la rejoindre à Lens dans le Nord. La grande incompréhension, nous apprenons que Maël a été victime du syndrome du bébé secoué. Je suis sous le choc, c’est incompréhensible, c’est violent, et en plus le coupable est le compagnon de ma fille, le père ! Je passe de la tristesse à la colère, je ressens de la haine contre ce monstre. Comment a-t-il pu faire ça ? Le géniteur se retrouve en détention provisoire. C’est mieux ainsi car je pense que j’aurai été capable de commettre un acte irréparable envers lui.
 
Pendant cette semaine, je suis auprès de ma fille pour la soutenir, tandis que Maël se bat tous les jours dans son lit à l’hôpital branché de partout et dans le coma.
 
Le 22 Mars en me levant j’ai une sensation bizarre. Je n’en parle à personne, au fond de moi je sais, c’est la fin. Maël va nous quitter… J’espère me tromper. Mon intuition était bonne, arrivée devant la chambre un drap blanc est installé. Je comprends et mon cœur se serre. Mon petit ange donnera son dernier souffle dans les bras de sa maman. Je suis dévastée, mais je dois être forte pour soutenir ma fille qui vient de perdre son enfant, la prunelle de ses yeux.
 
J’ai vécu les 3 jours après son décès comme un robot. Il a fallu très vite organiser les obsèques : choisir un beau cercueil, acheter la concession, échanger avec le prêtre, choisir les musiques… Je ne sais toujours pas comment j’ai fait pour ne pas m’écrouler. Ma fille avait besoin de moi, ma famille avait besoin de moi, nous nous aidions les uns les autres dans cette tragédie. J’ai reçu un énorme soutien de la part de ma fille ainée, elle était présente pour pouvoir organiser tout ça, je ne la remercierais jamais assez.
 
Cela fait maintenant 2 ans que mon petit-fils, mon ange, est parti rejoindre les étoiles. Je suis une mamie qui, depuis ce jour fatidique, a perdu un morceau de son cœur, je me sens brisée à cause d’un geste cruel de la part du géniteur.
 
Je me suis portée partie civile pour soutenir ma fille et aussi pour rendre justice à mon petit ange. A ce jour, nous sommes dans l’attente du procès. Le géniteur, quant à lui, est libre pour le moment, après seulement une année de détention provisoire. Je ne compte plus les fois où j’ai ressenti des envies de vengeance durant ces 2 dernières années. L’envie, le besoin, de lui faire payer tout ce qu’il a détruit… La vie d’un bébé et une famille au complet. Je reprends mes esprits et je me dis que nous avons déjà assez souffert et que Maël n’accepterait pas que sa mamie soit condamnée à cause de son géniteur qui en a déjà bien assez fait.
 
Perdre un enfant est le drame le plus horrible que peut vivre une famille, le perdre dans de telles conditions est insupportable. Maltraité et tué par celui qui aurait dû prendre soin de lui et l’accompagner à grandir, à devenir un homme un jour. Jamais je n’aurai pu imaginer vivre ce cauchemar.
 
Il faut apprendre à vivre dans ce cauchemar, à nous battre pour Maël et nous reconstruire du mieux possible. Je ne compte même plus les fois où je pleure en cachette. Je dis aux miens que tout va bien alors que c’est faux, c’est le contraire, j’ai le sentiment que rien ne va et la culpabilité me ronge tous les jours de ne pas avoir pu protéger mon petit-fils et ma fille de ce monstre. Les faux semblants font partis de mon quotidien depuis 2 ans.
 
J’attends la date du procès sachant très bien que la justice ne sera pas à la hauteur du crime commis. Ce que j’en espère de ce jour, c’est qu’il entende tout le mal qu’il a fait, qu’il constate le désastre et les vies qu’il a brisé à cause de son geste.
 
J’ai décidé de témoigner pour l’association Stop Bébé Secoué et de parler de toutes nos souffrances pour que vous sachiez que malheureusement ça n’arrive pas qu’aux autres.
 
Tous les jours je me bats, je cherche de la force car il en faut et surtout beaucoup de courage. A chaque fois que je baisse les bras, je pense à ma fille, et aussi à tous ces parents qui ont vécu ce drame. J’ai fait une promesse, je n’abandonnerai jamais ce combat, même après le procès car trop d’enfants encore à notre époque subissent cet acte qui laissent des enfants handicapés avec de très lourdes séquelles ou en décèdent.
 
On ne secoue jamais un enfant. Un enfant on lui donne tout notre amour.
 
 
Nathalie, mamie de Maël, mon ange